La lutte de Papa Okito pour l’indépendance

L’action politique de Papa Okito avait un caractère réformateur plutôt que révolutionnaire. Sous la colonisation, Papa Okito avait acquis l’expérience du dialogue, des réformes graduelles, et de la recherche du compromis avec l’adversaire.

Dans la pensée de Papa Okito, le colonisateur n’était pas assimilé à l’ennemi mais à un partenaire dont le peuple congolais devait s’inspirer pour combler son retard culturel et technologique. En 1959 le climat politique du Congo n’avait plus rien à avoir avec celui de 1958, année du 50è anniversaire de l’annexion du Congo par la Belgique. Les partis politiques avaient été autorisés et le 4 janvier le peuple de Léopoldville avait rejeté le régime colonial et montré à l’ensemble du Congo le chemin de l’indépendance. De tous les coins du pays surgissaient les partis politiques ainsi que les syndicats des travailleurs et les mouvements des jeunesses. C’est dans ce contexte que Papa OKITO créa son propre parti politique dénommé Union Rural Congolaise (URUCO) dont le programme se caractérisait par la modération et la demande de l’indépendance graduelle et en entente avec les Belges.   C’est pourquoi la première rencontre entre Papa Okito et Patrice Lumumba se caractérisa par un clash. Celle-ci eut lieu en août 1959 lors de la tournée  du leader du MNC au Kasaï. Les violons entre les deux leaders ne s’accordaient pas. La pierre d’achoppement était constituée par la vitesse de l’accession à  de l’indépendance.

En effet bien que les deux dirigeants étaient d’accord sur le principe de l’indépendance, le président de l’URUCO estimait que les évolués congolais manquaient de formation et l’expérience pour diriger le pays. Il fallait donc temporiser, demander aux Belges une indépendance progressive, le temps pour ces derniers de former les cadres congolais qui prendraient la relève au moment opportun. A cela le président de MNC rétorquait que si les Belges n’ont pas voulu former les congolais en 80 ans de colonisation, ce n’est pas en quelques années qu’ils nous formeront des ingénieurs, des médecins, des avocats etc. Les Anglais et les Français ont formé des universitaires comme Kwamé Nkroumah, Léopold Senghor, Sheik Anta Diop. Mais les belges n’ont formé aucun universitaire. Leur doctrine était : « pas d’élite, pas de problème » Nous allons former nos universitaires nous-mêmes et au besoin avec l’assistance des pays africains frères déjà indépendants. Mais au préalable il nous faut l’indépendance immédiate. Chacun campa sur sa position.

Mais malgré cette divergence d’opinion, et suite à  l’éclatement du MNC en MNC Lumumba et MNC Kalonji, en mai 1959, le mouvement nationaliste courait le risque d’être marginalisé dans son ancien fief du Kasaï.

Pour contrer ce risque,  Patrice Lumumba conscient du bénéfice qu’il pouvait tirer du prestige et de l’estime dont Papa Okito jouissait parmi les Kasaïens de toutes les tribus, sollicita et obtint de ce dernier qu’il coordonne les activités des partis nationalistes au Kasaï et en particulier au Sankuru dont ils étaient tous deux originaires. C’est pourquoi Patrice Lumumba demanda à Papa Okito de préparer à Luluabourg en avril 1960, le Congrès des partis nationalistes liés du MNC : UNION CONGOLAISE de André Lubaya, la FEDERATION DES BASONGE de Dominique Manono, l’URUCO, l’aile progressiste du MOUVEMENT SOLIDAIRE MULUBA de Barthélémy Mujanayi, l’ASSOCIATION DES ANA MONGO et certaines personnalités du PNP et les principaux chefs coutumiers du Kasaï.

Le but de ce Congrès était double : d’une part informer les partis nationalistes des résolutions de la conférence de la Table Ronde et d’autre part  constituer une plateforme solide en perspective des élections législatives prévues en mai 1960. Papa Okito, grâce aux entrées dont il bénéficiait  dans toutes ces associations du Kasaï, contribua d’une manière substantielle à la victoire des partis nationalistes avec près de 60% des voix. Il fut lui-même élu sénateur et 1er Vice-Président du Sénat.

Lutte de Papa Okito contre les fossoyeurs de l’indépendance

L’intervention de l’armée belge au Congo en juillet 1960 culmina le 5 septembre par la révocation du Premier Ministre Patrice Lumumba par Joseph Kasa-Vubu et son remplacement par Joseph Iléo dont le siège du Président du Sénat revenait d’office à Papa Okito, 1er Vice-Président.

Devant la nouvelle situation ainsi créée, l’activité politique de Papa Okito fut double :

–          La réconciliation entre le Président Kasa-Vubu et le Premier Ministre Lumumba

–          Le vote des pleins pouvoirs au Gouvernement de Patrice Lumumba

 

1-      La réconciliation

Instruit par l’expérience acquise sous la colonie et conscient du risque d’éclatement ou de guerre civile que courait le pays, Papa Okito persuada ses collègues du Sénat et de la Chambre des députés, d’user des instruments juridiques en leur possession pour obliger le Chef de l’Etat et le Premier Ministre de se réconcilier.

 

Vers le 10 septembre 1960, une commission de réconciliation constituée de 3 sénateurs et de 3 députés fut créée sous l’égide de la mission de l’ONU au Congo représentée par le haïtien François David. Du côté congolais en faisaient partie entre autres  Joseph Kasongo, Président de la Chambre des députés, Joseph Okito, Président du Sénat, Wéréguéméré Chrysostome et 3 autres parlementaires.

L’acte de réconciliation fut signé conjointement entre les parlementaires et le Président de la République et le Premier Ministre. Mais sous la pression des puissances étrangères, les dispositions de cet acte ne furent jamais appliquées par Kasavubu et son groupe.

 

Devant cette situation Papa Okito saisit le Secrétaire Général des Nations Unies Dag Hamadjshold par plusieurs télégrammes pour l’informer de la gravité de la situation. Les chercheurs pourront les retrouver au Quartier Général de Nations Unies à New York.

 

2-      Les pleins pouvoirs

Le groupe nationaliste ayant la majorité absolue au Parlement, Papa Okito convoqua une réunion conjointe des sénateurs et des députés dite le Congrès. Celui-ci vota à une large majorité les pleins pouvoirs au Gouvernement de Lumumba. Ce vote venait contrecarrer la stratégie des puissances favorables à Kasa-Vubu car il émanait d’une institution démocratiquement élue. C’est pourquoi, ne disposant plus de base juridique, les mêmes puissances eurent recours à la force en procédant à la fermeture du Parlement. C’est le fondement du coup d’état de Mobutu du 16 septembre 1960.

De ce qui précède, on voit que Papa Okito était avant tout un homme pacifique, instruit    par l’expérience coloniale, mais intraitable sur le respect des principes démocratiques. C’est pourquoi, il fut considéré comme l’ennemi juré par les fossoyeurs de la jeune démocratie congolaise. Il devait disparaître.

 

 

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