Me Hervé Kanene : ‘’ Le droit OHADA présente des règles souples, simplifiées et adaptées à la situation économique des États africains ‘’

C’est depuis le 1er février, que Maître Hervé Kanene a été élu président de l’Union des médiateurs de l’OHADA (UMOHADA), structure dont la tâche consiste principalement à accompagner les parties à trouver des solutions à leurs différends.  Cet expert en droit OHADA a au cours d’un entretien exclusif  avec votre rédaction, relevé que ce droit présente des règles souples, simplifiées et adaptées à la situation économique des États africains.

L’Objectif : Pourriez-vous vous présenter auprès de nos lecteurs ?

Hervé Kanene : Je suis avocat au Barreau de Kinshasa/Matete, assistant chargé des cours à la faculté de Droit de l’Université Chrétienne Cardinal Malula (UCCM), doctorant en droit des affaires, master à l’Université protestante au Congo en droit OHADA et Contentieux, Arbitre à la Cour commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA (CCJA), basée à Abidjan en Côte d’Ivoire, et président de l’UMOHADA, basée également à Abidjan.

Qu’est-ce que l’opinion peut retenir du droit OHADA ?

Il s’agit de l’Organisation pour l’harmonisation du droit des Affaires en Afrique. C’est une institution panafricaine qui a pour mission d’harmoniser le droit des Affaires en Afrique, lequel est né des pressions des hommes d’affaires, surtout des expatriés qui ont investi en Afrique. Ces hommes d’affaires présentaient des plaintes, des doléances, étant donné que le système juridique ou judiciaire africain ne sécurise pas les affaires. Il fallait trouver des mécanismes juridiques pouvant rendre fiable leurs activités dans le sens de la sécurité juridique. Fort de ces pressions, les africains se sont regroupés et ont adopté un traité né à Port Louis en île Maurice le 17 octobre 1989, avec comme objectif, d’harmoniser le droit des affaires avec des règles souples, simplifiées et adaptées à la situation économiques des États africains, avec des instruments juridiques qui sont des actes uniformes, des lois qui régissent l’OHADA.

Quel est le bien fondé du droit de l’OHADA ? 

C’est L’uniformité de ce droit qui utilise des mêmes règles applicables dans tous les États africains membres de l’OHADA, comme si ces États  n’étaient qu’un seul. C’est un droit souple, qui requiert la célérité, contrairement aux lois étatiques internes qui avaient des procédures élastiques.

Que peut-on comprendre par la CCJA et quelle sa particularité dans le système de l’OHADA ?

La CCJA, c’est la Cour commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA.  C’est une Cour suprême en droit des Affaires OHADA. En droit des affaires de l’OHADA, les litiges sont soumis devant la CCJA qui rejuge le fond du litige. La CCJA travaille dans l’indépendance de la magistrature, sans recevoir une quelconque injonction. Elle casse des décisions en matière d’affaires qui n’ont pas trouvé des solutions devant les tribunaux Étatiques en première instance et en appel. Cette instance est composée de 13 membres ressortissants de ces pays qui sont élus par le conseil des ministres.

Parlez-nous de la médiation en droit de l’OHADA ?

La médiation en droit OHADA, c’est l’un des modes alternatifs des règlements de différends (MARDE). C’est un processus dans lequel les parties demandent à un tiers de les aider à parvenir à un règlement amiable d’un litige relatif à un contrat. Le médiateur n’impose pas la solution, mais accompagne les parties dans la recherche de la solution. La solution vient des parties elles-mêmes, mais elles ne peuvent la trouver elles-mêmes. Il existe 4 grands principes qui gouvernent la médiation notamment : l’indépendance, la neutralité, la discrétion et la confidentialité.

Ce sont les parties elles-mêmes de commun accord qui choisissent le médiateur, qui n’est pas forcément un juriste. Mais, si le médiateur est un juriste, il doit éviter d’apporter des solutions juridiques au litige. Les parties ont besoin d’aboutir au compromis afin de préserver leurs relations d’affaires.

Qu’en est-il d’un arbitre ?

Un arbitre est un juge privé. Les Cours et Tribunaux sont des juridictions Etatiques contraignantes. Ils utilisent la force publique pour l’exécution de leurs décisions. Mais l’arbitrage est une juridiction contraignante mais non étatique. Ses décisions sont appelées des sentences arbitrales.

Quelle différence faites-vous entre vous la médiation et l’arbitrage ?

La différence est que l’arbitrage est contraignant, tandis que la médiation n’est pas une justice contraignante. Le médiateur tranche. Par contre, l’arbitre tranche conformément aux lois. Mais le médiateur ne tranche, ni ne juge. Il accompagne les parties à trouver un compromis qui leur permettra de s’entendre.

L’OHADA a récemment adopté un nouvel acte uniforme relatif à la médiation. Qu’en est-il exactement ?

Effectivement, le conseil des ministres de l’OHADA venait  d’adopter le 10ème acte uniforme relatif à la médiation en date du 23 novembre 2017 à Conakry. C’est un acte uniforme qui régit la médiation dans l’espace OHADA. Le conseil des ministres avait également révisé l’acte uniforme relatif au droit d’arbitrage.

Vous êtes président de l’Union des médiateurs de l’espace OHADA (UMOHADA). Pourriez-vous nous parler de cette structure ?

L’Union des médiateurs de l’espace OHADA (UMOHADA), est une association panafricaine en médiation OHADA, qui a une composition hétéroclite c’est-à-dire  elle est composée des membres de chaque État. C’est une structure qui a été mise en place par les tous premiers médiateurs formés une semaine après l’adoption de l’acte uniforme, le 1er décembre 2017. Elle est née des médiateurs formés en médiation OHADA, et qui a son champ d’action dans les 17 nations. Elle a son siège à Abidjan. Nous avons pris les fonctions de président de l’UMOHADA à l’issue des élections organisées récemment au mois de février. Elle est composé de plusieurs membres entre autres un PCA, un premier vice- président issu du Mali, 2ème vice-président de la Guinée Conakry, le Secrétaire général de la Cote d’ivoire, le Secrétaire général adjoint du Cameroun, la Trésorière du Congo Brazzaville, Trésorière adjointe de la Côte d’Ivoire, ainsi que le chargé des relations publiques de la Côte d’Ivoire.

Quels sont les objectifs poursuivis au sein de l’UMOHADA ?

L’UMOHADA est chargée de vulgariser l’acte uniforme sur la médiation. Elle est chargée de la promotion de la médiation comme l’un des modes alternatifs de règlement des différends. Elle contribue à former les médiateurs à l’OHADA. C’est ainsi qu’elle a noué un partenariat avec l’école Régionale supérieure de la magistrature de l’OHADA (ERSUMA). Aussi inciter les opérateurs à inclure la convention de médiation ou la clause de médiation dans leur contrat avec leur partenaire d’affaires.

Quelles sont les motivations qui vous ont conduit à vous spécialiser dans ce droit ?

D’abord parce que je suis détenteur d’un diplôme de licence en Droit économique et social, communément appelé droit des affaires. Ce n’est pas le fait du hasard, que je me suis retrouvé dans cette faculté et dans cette option. J’aime le droit des affaires. Un bon droit où  il y a célérité dans le traitement des affaires, il sécurise les opérateurs économiques. De part ma formation universitaire, et mon expérience professionnelle en tant qu’avocat, j’ai traité beaucoup de dossiers de sociétés commerciales.

Votre mot de la fin ?

Que les congolais soient conscients que leur pays constitue le plus grand État membre de l’OHADA. Qu’ils s’approprient ce droit OHADA et en même temps le vulgariser.

Propos recueillis par Nico Kassanda

Laisser un commentaire

Banner Meet DefMaks